Par Hakim Laâlam Email : laalamh@yahoo.fr |
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Sommés de quitter la place des Martyrs, les gardes communaux Tout un symbole !
Non ! Non ! Et trois fois non ! Moi, j’vous le dis, tout se perd ! Déjà, l’autre jour, quand j’ai appris que du personnel de la présidence de la République avait débrayé en observant sur
place, dans l’enceinte même du Palais, pas dehors, un sit-in, je m’étais dit «hum ! hum !» Mais, très honnêtement, je n’avais pas poussé la réflexion plus loin qu’un double «hum !» Mais
là, avec l’enchaînement des événements, même un triple, voire un quadruple «hum !» ne me serait pas d’un grand secours. Tout ce qu’il y a d’institutionnel dans ce pays se dévergonde, sort
de l’obligation de réserve et fait voler en éclats les barrières convenues. Il y a ces maires qui, même s’ils gèlent (quelle idée de geler au printemps !) leur colère, n’en renoncent pas
pour autant à leur menace de sortir dans la rue. Il y a les greffiers du très officiel ministère de la Justice qui pètent eux aussi un plomb et tout le compteur avec. Il y a le collectif
des consœurs et confrères d’ El Moudjahid qui affiche ouvertement sa volonté d’en découdre avec la direction. El Moudjahid! Vous imaginez ? Il y a ces autres consœurs et confrères des
radios dupliquées de l’Etat. L’ENRS ! Vous imaginez ? Du boulevard des Martyrs, il vous suffit de descendre trois rues plus bas pour tomber, place des Martyrs sur les gardes communaux en
pétard, un service de sécurité créé par l’Etat et au service du maintien de l’ordre. Et il y a aussi ces anciens cadres de l’armée nationale verts de rage du sort qui est le leur. Tous
occupent une portion de trottoir, une placette, un abribus, une bretelle d’autoroute, un transformateur électrique désaffecté ou une impasse du régime. L’Etat en grève ! Eddawla en colère
! Contre elle-même, c’est un comble, tout de même ! Y’a forcément un truc qui ne va pas. Ce matin encore, je lisais en Une d’ El Moudjahid que l’Algérie ne s’est jamais mieux portée que
depuis qu’elle est dirigée par Abdekka. Mais alors, pourquoi faire grève au 20, rue de la Liberté, peuchère ? Sur les ondes de la Chaîne de la Radio nationale, il y a à peine deux
semaines, les initiateurs des marches du samedi étaient quasiment qualifiés d’anti-Algériens. Mais alors, pourquoi un sit-in maintenant, au Boulevard ? Non ! Non ! Et encore une fois, non
! Et si ça ne suffit pas, je re-dégaine ma bordée de «hum ! hum !». Moi, j’ai besoin de visibilité. Et quelle visibilité voulez-vous que j’ai si même El Moudjahid se met à faire grève,
hein ? Chacun sa chacune, SVP ! Nous, les antinationaux, les non-Algériens, nous nous occupons de faire ce que nous savons faire, les grèves, les marches, les marches avortées surtout,
les sit-in, les débrayages et autres Tikherbichines associés. Et en face, les services de l’Etat font ce qu’ils ont à faire. Nous interdire de marcher, nous bousculer, nous matraquer et
nous décrire le jour même sur les ondes ou le lendemain à pleines colonnes comme de dangereux déstabilisateurs. Parce que maintenant, si tout le monde se met à faire tout et n’importe
quoi, ou allons-nous, je vous le demande ? Quoi ? Comment ? Je ne peux rien vous demander ? Mais pourquoi diable ? Parce que, vous aussi, vous êtes en grève ? Mon Dieu ! Ça y est, c’est
la fin ! C’est la révolution ! Je fume du thé et je reste éveillé, le cauchemar continue. |